Janvier 2005

Chien guide d'aveugle : une nouvelle corde à l'arc du BERGER ALLEMAND.

La vie est faite de hasards et de rencontres. Il y a une vingtaine d'années, alors qu'il préparait son avenir professionnel dans le secteur de la réparation automobile, Christophe BEYSSEN est tombé sous le charme d'Ulla, la femelle Berger Allemand du patron du garage dans lequel il travaillait. Mais de là à devenir éleveur... Il devra encore patienter de nombreuses années, mûrissant lentement mais sûrement ce projet. C'est donc un parcours qu'il qualifie lui-même d'atypique que Christophe a connu... Un parcours qui lui a permis dernièrement de mettre en avant une aptitude sous-estimée chez le B.A. : celle de chien-guide d'aveugle.

  "Ulla, la femelle Berger Allemand du patron du garage dans lequel je travaillais, m'a fait découvrir combien le B.A. est un chien d'exception, qui impose d'emblée ce sentiment d'indicible harmonie et de profond respect", explique Christophe BEYSSEN. Pourtant, rien ne prédisposait vraiment au départ ce réparateur automobile à devenir éleveur. En charge de plusieurs centres autos par la suite, il a même dû s'éloigner du Berger Allemand. "Cette privation m'a conduit à mûrir lentement ce projet d'élevage canin et c'est en 1999, lorsqu'une possibilité de reconversion s'est profilée, que commence l'histoire". Christophe choisit pour affixe "L'ODE DES LOUPS". Résigné, il avoue que pour lui il n'y a eu aucune alternative : "Ce sera un élevage spécialisé, un élevage de Begers Allemands."

Le Berger Allemand compte, on le sait, parmi ces races dites polyvalentes, mais pour Christophe, là aussi, les choses sont claires : "Pour ma part, il n'existe qu'un seul Berger Allemand. C'est celui qui, anatomiquement, est conforme au standard et apte à une utilisation polyvalente." C'est la raison pour laquelle son cheptel est composé de lices issues des plus grnads champions de beauté et tous sont titulaires de titres de travail tels que le RCI ou la Schutzhund, des disciplines qui associent obéissance, pistage et mordant. "De plus, il faut savoir que notre Nationale d'élevage tient compte des aptitudes comportementales. En effet, les sujets de la classe travail, âgés de deux ans minimum, doivent être titulaire d'un titre de travail, et feront l'objet d'une épreuve de courage. Il est donc, à mon sens, opportun de s'intéresser à l'ensemble des critères sans se focaliser exclusivement sur la beauté ou sur le travail" précise t-il encore.

Trouver les lignées appropriées 

Sélectionner de beaux et bons B.A. : Christophe BEYSSEN aurait pu en rester là ! On va en tout cas reconnaître grâce à lui une aptitude supplémentaire chez le Berger Allemand, et pas n'importe laquelle : celle d'un chien apte à seconder et accompagner dans leur vie quotidienne les non-voyants. "Cela avait déjà été fait par le passé et il est vrai qu'en observant ce chien pour le moins exceptionnel, on prend conscience qu'on est en présence du roi des chiens, unique race utilisée dans tous les métiers" s'émerveille Christophe. C'est donc fort de ce constat qu'il a finalement l'Ecole des chiens-Guides d'aveugles du Sud-Ouest de se lancer dans l'expérience. Grâce à la sélection rigoureuse qu'il opère dans son élevage et "qui s'articule autour de la santé, avec des dépistages systémathiques de la dysplasie coxo-fémorale et de la dysplasie du coude tenant compte des aspects comportementaux et morphologiques", il a su "retenir l'attention de Catherine Oelhoffen, directrice de l'établissemnt, et de Maria Gabrielly, responsable de l'élevage de l'école".

Fondée en 1985, l'Ecole des Chiens-Guides d'Aveugles du Sud-Ouest avait bien pensé avoir recours à des B.A., mais sans apparemmant jamais trouver les lignées appropriées. Inspirés de l'expérience anglo-saxonne, ses dirigeants se sont focalisés sur le labrador et le golden retriever. "Ils sont restés sur leur faim," analyse Christophe BEYSSEN, "sachant que les écoles allemandes utilisaient déjà depuis fort longtemps leur berger national dans ce domaine. Aujourd'hui, l'évolution est telle que Maria Gabrielly envisage à moyen terme de compléter son cheptel de quelques reproductrices sur la base de mes petits souvent directement issus d'étalons allemands ", se réjouit l'éleveur.

Il ne fait aucun doute que le Berger Allemand dispose de toutes les qualités essentielles pour tenir ce rôle : "Sa bonne volonté est un atout considérable pour ce genre de mission et les premiers à être convaicus de son efficacité sont les non-voyants eux-mêmes. Doué d'une capacité de discernement surprenante, fondée sur une grande sensibilité et une prédisposition naturelle à apprendre, le B.A. est capable de s'intégrer à des rôles très variés, faisant appel à des réactions émotives antagonistes. Volontaire, parfaitement équilibré et sûr de lui, il transmet une sensation rassurante au non-voyant. Aussi, plus grand que le Labrador, il s'impose parfois à certains non-voyants", explique Christophe BEYSSEN.
 

Nous n'en sommes qu'au début, mais la collaboration entre l'éleveur et l'école à déjà permis de confier près d'une dizaine de chiens à des familles de tutelle. "Sachant que seulement 36 chiens par an, toutes races confondues, sont remis aux non-voyants, l'intérêt que porte l'école au berger allemand est encourageant." Toutefois, la difficulté pour l'école n'est pas seulement de faire aboutir les efforts concentrés sur le chien mais aussi de trouver des familles de tutelle. "Elles sont en effet les piliers de l'action de l'école, véritables fondations sans lesquelles l'édifice s'écroulerait", constate Christophe. "Sous le contrôle et avec l'aide d'un personnel qualifié, elles élèvent les chiots pour en faire des chiens équilibrés. Mais voilà, elles sont encore trop peu nombreuses à se manifester."
 

 Pour 2005, Christophe BEYSSEN entend renforcer son action auprès de l'Ecole des Chiens-Guides d'Aveugles du Sud-Ouest. "Une autre priorité permanente nécessitera d'avoir accès aux saillies sur les meilleurs étalons, privilège qui nous permet de suivre l'évolution de la race et d'intervenir dans son amélioration. Cette qualité sera validé lors des jugements en expositions et l'une des cibles sera le prochain Championnat de France." Mais plus que tout, l'objectif principal restera pour Christophe de "mériter la confiance que nous témoignent nos B.A. pour que ce chien, qui reste inégalé, demeure le berger allemand : "un esprit sain, dans un corps sain, le regard tourné vers le monde." Car l'éleveur ne se voile pas la face : s'il est évident que le B.A. est capable de prouesses et qu'il rend mille services à l'homme, "il reste encore aujourd'hui, par méconnaissance aux yeux de certains, un chien dangereux. Trop souvent on a tendance à confondre le "chien-loup", issu parfois de croisement inopportun, et le chien de race, issu d'une sélection structurée, mûrement réfléchie et rigoureuse."

Claude PACHETEAU